Nombreuses sont les questions de familles qui interrogent ADPFE sur la question du transfèrement en France d’un proche condamné à l’étranger.
Le rapport du gouvernement sur la situation des français établis hors de France estimait qu’au 31 mars 2017, 2 056 ressortissants français étaient incarcérés à l’étranger.
Afin d’envisager ce sujet important, il faut bien distinguer les situations dans lesquelles une personne a été arrêtée mais n’a pas encore été jugée de celles dans lesquelles une personne a été arrêtée puis jugée.
Le « transfèrement » concerne en effet seulement cette deuxième situation et la situation des personnes ayant été effectivement condamnées dans un autre Etat puisqu’il s’agit d’un processus qui permettra à une personne détenue d’être conduite d’un établissement pénitentiaire vers un autre.
Au niveau international, il s’agira pour une personne condamnée dans un Etat d’être remise à un autre Etat afin d’y exécuter sa peine.
Au niveau de l’Union européenne, la Décision-cadre 2008/909/JAI du Conseil du 27 novembre 2008 a été traduite en droit français par la loi no 2013-711 du 5 août 2013 portant diverses dispositions d’adaptation dans le domaine de la Justice en application du droit de l’Union européenne et des engagements internationaux de la France.
Au niveau international, des conventions bilatérales peuvent régir la question du transfèrement.
La France est signataire de plusieurs conventions bilatérales régissant le transfèrement comme, par exemple, les conventions du 25 janvier 1983 avec les États-Unis, la convention du 26 mars 1983 relative à l’exécution des condamnations pénales avec la Thaïlande ou encore l’accord entre la France et Hong-Kong du 9 novembre 2006.
Toutefois, la convention européenne sur le transfèrement des personnes condamnées aussi appelée Convention de Strasbourg du 21 mars 1983 entrée en vigueur le 1er juillet 1985 reste essentielle.
Cette Convention a pour objet principal de favoriser la réinsertion sociale des personnes condamnées en permettant à un étranger privé de sa liberté à la suite d’une infraction pénale de purger sa peine dans son pays d’origine.
Comme le précise le Conseil de l’Europe, la Convention de Strasbourg procède également de considérations humanitaires.
Depuis plusieurs années, il est reconnu que les difficultés de communication, les barrières linguistiques et l’absence de contact avec la famille, peuvent avoir des effets néfastes sur le comportement des détenus.
Un transfèrement peut être demandé aussi bien par l’Etat dans lequel la condamnation a été prononcée (Etat de condamnation) que par l’Etat dont le condamné est ressortissant (Etat d’exécution).
Il est subordonné au consentement de ces deux Etats, ainsi que du condamné.
La Convention définit également les procédures d’exécution de la condamnation après le transfèrement.
La peine ou la mesure appliquée ne doit, ni par sa nature, ni par sa durée, être plus sévère que celle qui a été prononcée dans l’Etat de condamnation.
Dans notre ordre juridique interne, ce sont les articles 728-1 et suivants du code de procédure pénale qui régissent la question du transfèrement.
Les articles 728-2 à 728-9 du CPP concernent principalement la mise en œuvre des conventions bilatérales et de la convention multilatérale de Strasbourg.
Une personne détenue en exécution d’une condamnation prononcée par une juridiction étrangère pourra donc être transférée sous certaines conditions sur le territoire français pour y accomplir la partie de la peine restant à subir.
Dès son arrivée sur le sol français, le condamné détenu est présenté au Procureur de la République du lieu d’arrivée, qui procède à son interrogatoire d’identité.
Au vu des pièces constatant l’accord des Etats sur le transfèrement et le consentement de l’intéressé ainsi que le jugement étranger de condamnation, le procureur de la République requiert l’incarcération immédiate du condamné.
La peine prononcée à l’étranger est, par l’effet de la convention ou de l’accord international, directement et immédiatement exécutoire sur le territoire national pour la partie qui restait à subir dans l’Etat étranger.
Toutefois, lorsque la peine prononcée est plus rigoureuse que la peine prévue par la loi française pour les mêmes faits, le tribunal correctionnel du lieu de détention, saisi par le procureur de la République ou le condamné, lui substitue la peine qui correspond le plus en droit français ou réduit cette peine au maximum légalement applicable.
Il déterminera la durée de la peine à exécuter dans la limite de la partie qui restait à subir dans l’Etat étranger.
Il est important de relever qu’aucune poursuite pénale ne peut être exercée ou continuée et aucune condamnation ne peut être exécutée à raison des mêmes faits contre le condamné qui exécute en France, en application d’une convention ou d’un accord international, une peine privative de liberté prononcée par une juridiction étrangère.
Il a été jugé que l’adaptation de peines prononcées dans un État étranger, à l’encontre d’une personne transférée pour leur exécution en France, ne peut avoir pour effet d’aggraver la situation qui aurait été la sienne dans l’État de condamnation (Crim. 30 nov. 2016, pourvoi n° 15-83869).
Enfin, selon l’article 9 §°3 de la convention de Strasbourg :
« L’exécution de la condamnation est régie par la loi de l’Etat d’exécution et cet Etat est seul compétent pour prendre toutes les décisions appropriées ».
En application cet article et de l’article 728-8 du code de procédure pénale, ce sera la loi française qui régira la peine prononcée à l’étranger dès qu’elle sera mise à exécution en France.